l’agenda numérique de l’Allemagne

L’Allemagne est en retard en matière d’équipements numériques et de digitalisation de son administration. L’indice mondial de qualité de vie numérique 2021 place l’Allemagne (9e) derrière le Danemark (1er), les États-Unis (5e), la France (7e) et la Suisse (8e). Le pays est notamment handicapé par le retard du réseau haut débit, lui valant la 59e place, et une administration peu numérisée. « Nous en sommes encore au stade de l’administration papier » dénonce Achim Berg, président de Bitkom, l’association allemande pour les technologies de l’information. « Il nous faut encore faire la queue pendant deux heures pour renouveler une carte d’identité, alors que cela se fait à distance dans beaucoup d’autres pays » a-t-il déclaré.

L’Allemagne tente de combler son retard. Le chancelier allemand Olaf Scholz et son gouvernement se sont fixés pour objectif de réaliser une « transformation numérique » du pays au cours de la période législative actuelle (2021 – 2025). Au programme : la connexion de tous les ménages et de toutes les entreprises au réseau de fibre optique d’ici 2030 - et la moitié d’ici 2025 -, la mise en place d’une stratégie de soutien à la création de start-up et le développement de l’administration en ligne « à tous les niveaux ». Les démarches administratives doivent par exemple pouvoir être accomplies rapidement et facilement en ligne, et chacun doit pouvoir s’identifier par voie numérique et en toute sécurité.

Le ministre des Transports et des Affaires numériques, Volker Wissing, a affirmé que son ministère serait à la tête de cette initiative. « Avec notre stratégie, nous voulons réaliser le réveil numérique de l’Allemagne. Le bureau à domicile, le streaming dans l’ICE (train à grande vitesse allemand) et la réception réseau dans les refuges de montagne doivent enfin être possibles sans aucun problème », a ajouté M. Wissing dans une déclaration publique.

L’Allemagne parviendra-t-elle à réaliser son ambition numérique ? Rien n’est moins sûr. Déjà sous le feu des critiques pour son manque d’ambition et de précision, le ministre avait promis des ajustements et la présentation du projet final avait été repoussée de plusieurs mois. Le projet final a finalement été approuvé par le cabinet fédéral le 31 août. Les responsabilités des ministères respectifs ont été clarifiées mais les critiques pointent toujours son manque d’ambition.

La réalisation de cette stratégie pose également question. Selon Helmut Martin-Jung, rédacteur en chef au Süddeutsche Zeitung, « la responsabilité est fragmentée entre le gouvernement fédéral, les Länder et les collectivités locales, ces différentes organisations refusant ou étant tout simplement incapables de communiquer entre elles, travaillant avec un labyrinthe complexe de bureaux bureaucratiques et de règles qui peuvent se chevaucher ou se contredire ».

Il faut également tenir compte de l’importance en Allemagne de l’équilibre budgétaire qui fait que les législateurs sont plus sensibilisés par le coût de l’amélioration de l’infrastructure numérique que par le coût supplémentaire qu’engendrera à long terme son report. Une autre différence culturelle s’exprime par la méfiance à l’égard des nouvelles technologies, comparée à l’Asie du Sud-Est par exemple. Le 9 juin dernier, lors de la conférence digital re:publica à Berlin, le chancelier avait ironisé sur le fait que les Allemands doivent attendre des heures à la mairie juste pour renouveler leur carte d’identité. « Je ne peux pas dire exactement quand cela va changer car je sais comment les choses se passent en Allemagne », avait-il déclaré.

Auteur : David Lefèvre

Sources :

  • digital-strategy.ec.europa.eu
  • dw.com
  • euractiv.fr

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