L'accès anticipé au marché des dispositifs médicaux numériques dans le cadre de la procédure PECAN

Considérant l’importance des produits de santé numériques, la France a introduit au printemps 2023 une procédure de remboursement anticipé pour les dispositifs médicaux numériques (DMN) : la procédure PECAN (Prise en charge anticipée des dispositifs médicaux numériques). Elle permet aux fabricants de DMN, selon un processus dérogatoire, de bénéficier d'une prise en charge par l'assurance maladie pendant un an non renouvelable sans apporter les preuves définitives de leur efficacité clinique . Le modèle allemand de remboursement Fast Track pour les Digitale Gesundheitsanwendungen (applications numériques de santé, DiGA) a incontestablement servi de source d'inspiration au législateur français. Mais quelles sont les principales différences dans la procédure allemande DiGA ?

Considérant l’importance des produits de santé numériques, la France a introduit au printemps 2023 une procédure de remboursement anticipé pour les dispositifs médicaux numériques (DMN)1 : la procédure PECAN (Prise en charge anticipée des dispositifs médicaux numériques). Elle permet aux fabricants de DMN, selon un processus dérogatoire, de bénéficier d'une prise en charge par l'assurance maladie pendant un an non renouvelable sans apporter les preuves définitives de leur efficacité clinique2. Le modèle allemand de remboursement Fast Track pour les Digitale Gesundheitsanwendungen (applications numériques de santé, DiGA) a incontestablement servi de source d'inspiration au législateur français.3 Mais quelles sont les principales différences dans la procédure allemande DiGA ?

Uniquement des dispositifs médicaux de faible classe de risque

Dans la procédure française, un remboursement est envisageable pour un DMN à condition qu'il s'agisse d'un dispositif médical certifié CE à visée thérapeutique (thérapie, diagnostic ou compensation d'un handicap) ou de télésurveillance médicale de patients.4 En Allemagne, le DMN doit aider à détecter, surveiller, traiter ou soulager des maladies ou à détecter, traiter, soulager ou compenser des blessures ou des handicaps.5 De plus, si en France, il peut s'agir de dispositifs médicaux de toutes les classes de risque,6 en Allemagne, seuls les dispositifs médicaux des classes de risque faibles (I et IIa) sont remboursables.7 Une extension à la classe de risque (IIb), plus élevée, est prévue.8

Nécessité d’une étude pilote menée à bien pour la procédure allemande

En France, un référencement temporaire nécessite que le DMN fasse au moins l’objet d’études en cours qui sont présumées apporter des données afin de conclure à un bénéfice clinique ou à un progrès dans l'organisation des soins.9 La Haute Autorité de Santé (HAS) évalue les premières données disponibles avec l'aide de la Commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS). Les fabricants allemands de DiGA doivent fournir à l'Institut fédéral des médicaments et des dispositifs médicaux (Bundesinstitut für Arzneimittel und Medizinprodukte, BfArM) une justification plausible selon laquelle un effet positif sur les soins peut être prouvé, par une évaluation systématique des données sur l'utilisation de son DiGA (étude pilote).10 Cette évaluation doit être intégrée dans un concept d'évaluation indépendant du fabricant, qui reflète surtout le design de l'étude prévue.11

Délai plus étendu pour prouver les bénéfices

Pour obtenir une inscription permanente du DMN sur la Liste des Produits et Prestations Remboursables (LPPR) ou de la Liste des Activités de Télésurveillance Médicale (LATM) et donc une prise en charge permanente, les résultats finaux d’une étude clinique doivent être présentés, respectivement six12 ou neuf13 mois après la prise en charge provisoire.14 L'Allemagne est plus généreuse à cet égard, puisque les résultats de l’étude ne doivent être présentés au BfArM qu'après la fin de l'année d'essai, c'est-à-dire après 12 mois.15

Libre fixation de prix la 1ère année

Le système français n'a pas adopté la libre fixation des prix au cours de la première année après le référencement. Le fabricant de DMN peut exprimer une idée de prix, mais le prix est finalement fixé de manière contraignante par le Ministère de la Santé et de la Prévention.16 En Allemagne, le fabricant peut fixer librement le prix de remboursement en respectant un montant maximal pendant la première année avant que les négociations de prix ne commencent. Cependant, si les prix sont trop élevés la première année, il en résulte des obligations de remboursement pour les fabricants.

Conclusion

Les points de recoupement entre la méthode française PECAN et la méthode allemande DiGA sont en principe nombreux. Néanmoins, il existe des différences. En Allemagne, seuls les dispositifs médicaux de faible niveau de risque sont remboursables, les services de télémédecine ne le sont pas. En France, les résultats finaux de l'étude doivent déjà être présentés après six ou neuf mois et il n'y a pas de libre fixation des prix la première année. Néanmoins, le parallélisme des procédures est le bienvenu et devrait permettre à un grand nombre de fabricants de produits de santé numériques de commercialiser leurs produits dans les deux pays sans avoir à investir trop de temps et d'argent supplémentaires.

PECAN

DiGA

Dispositifs médicaux des classes de risque I à III

Dispositif médical des classes de risque I à IIa (extension à la classe IIb prévue)

DMN à visée thérapeutique ou diagnostique ou DMN de télésurveillance médicale

DMN à visée thérapeutique ou diagnostique

Données d'une étude en cours ou étude pilote

Données d’une étude pilote

Preuve complète du bénéfice après 6 ou 9 mois

Preuve complète du bénéfice après 12 mois

Rédactrice : Julia Kleinschmidt, Maître en droit

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[1] Décret n° 2023-232 du 30 mars 2023 relatif à la prise en charge anticipée des dispositifs médicaux numériques à visée thérapeutique et des activités de télésurveillance médicale par l'assurance maladie au titre de l'article L. 162-1-23 du code de la sécurité sociale.

[2] Article L162-1-23 CSS.

[3] https://www.ekonomico.fr/2021/10/la-france-va-permettre-un-acces-rapide-au-marche-pour-les-developpeurs-dapplis-de-sante/.

[4] L162-1-23 CSS.

[5] § 33a, alinéa 1, phrase 1 SGB V.

[6] Article L162-48 CSS.

[7] § 33a al. 1 et 2 SGB V.

[8] Loi sur le numérique, projet du Cabinet, article 1, point 4, alinéa b).

[9] Article L162-1-23, Article R 162-113 CSS.

[10] § 14 Règlement sur la procédure et les exigences pour l'examen de l'admissibilité au remboursement des applications numériques de santé dans le cadre de l'assurance maladie obligatoire (DiGAV).

[11] § 145 Règlement sur la procédure et les exigences pour l'examen de l'admissibilité au remboursement des applications numériques de santé dans le cadre de l'assurance maladie obligatoire (DiGAV).

[12] Pour les DMN à visée thérapeutique.

[13] Pour les DMN de télésurveillance médicale.

[14] Article L162-1-23 CSS.

[15] § 139e al. 4 phrase 5 SGB V.

[16] Article L165-1-5 CSS.