Un sujet macroéconomique : Quelle politique énergétique pour l’Europe de demain ?

Au lendemain des élections européennes, comment peut-on appréhender les problématiques énergétiques de l’Europe et quelles sont les ambitions de l’Union Européenne à ce sujet ?

Une politique énergétique européenne commune est-elle possible et souhaitable ? Quel mix énergétique doit-on privilégier ? Doit-on sortir du nucléaire ? Comment peut-on sécuriser les approvisionnements en énergie à travers l’Europe ?

L’Union Européenne est le troisième plus gros consommateur d’énergie après la Chine et les Etats-Unis. Les pays européens agissent tels des « iles énergétiques » à savoir que chaque Etat a sa propre stratégie énergétique. D’après les statistiques Eurostat de 2016, l’Europe importe 50% de ses besoins énergétiques notamment auprès de la Russie qui fournit 31,9% des importations de l’Europe en gaz. La majorité des importations énergétiques de l’Europe concernent les produits pétroliers (2/3), suivi par le gaz (24%) et les combustibles solides (9%). Si des pays comme le Danemark sont à 80% autonomes énergétiquement, ce n’est par ailleurs pas le cas de Malte qui importe 80% de ses ressources énergétiques.

Au sein même de l’Europe, la production d’énergie se décompose comme suit :

En réponse à la fragmentation du marché de l’énergie et du fait de l’instabilité des relations avec la Russie suite à la crise ukrainienne, la commission européenne a convenu de la création de l’Union de l’Energie en 2015. L’objectif de cette Union est de fournir aux consommateurs (ménages et industriels) une énergie durable, compétitive et accessible. L’harmonisation du marché de l’énergie est l’un des objectifs pour l’UE et celleci permettrait de réaliser des économies d’échelle et de renforcer la coopération et la solidarité en Europe.

Concrètement, les objectifs de l’Union de l’Energie à l’horizon sont les suivants :

L’ Union de l’Energie souhaite réduire sa consommation énergétique d’au moins 27%, diminuer ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40% d’ici 2030 (par rapport aux niveaux de 1990) et souhaite également une amélioration de 27% de l’efficacité énergétique. Le programme ambitionne également de faire de l’Union Européenne le « numéro un mondial des énergies renouvelables et de la lutte contre le réchauffement climatique ».

Ce cadre a été adopté par les dirigeants de l’Union Européenne en octobre 2014 et s’inscrit dans le prolongement du paquet sur le climat et l’énergie à l’horizon 2020.

Un projet phare de cette construction énergétique européenne est le corridor gazier sud européen actuellement en cours de construction, qui doit relier l‘Azerbaïdjan à l‘Union européenne et ainsi limiter la dépendance de l’Union Européenne envers la Russie. Les premières livraisons du gaz vers l’Europe (gaz issu du gisement Shah Deniz - plus grand champ de gaz d’Azerbaïdjan) devrait débuter en 2020.

L’Union Européenne entend également accroitre la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique. L’objectif est de passer d’un système énergétique basé sur les combustibles fossiles à un système à faible émission de carbone, entièrement numérique et axé sur le consommateur.

Les effets attendus de la réorganisation de la transition énergétique européenne sont innombrables et promettent des progrès autant sociaux qu’économiques tels que :

  • Réduction des émissions des gaz à effet de serre ;
  • Réduction de la dépendance énergétique envers des pays tiers ;
  • Diminution du prix de l’énergie pour les consommateurs et donc réduction de la pauvreté énergétique qui touche actuellement 50 millions de personnes dans l’UE ;
  • Amélioration de l’air respirable et donc in fine de la santé publique ; 
  • Création d’emplois à travers d’innovation technologique notamment en matière de production et de distribution d’énergie. Une alliance européenne des producteurs de batteries électriques a été mise à l’agenda européen, car les débouchés en matière d’électro-mobilité et de stockage d’électricité sont très prometteuses (etc.).

Rappelons qu’en janvier 2019, Angela Merkel et Emmanuel Macron ont signé le traité sur la coopération et l’intégration franco-allemandes, connu sous le nom de traité d’Aix-la-Chapelle. L’un des articles de ce traité vise à prévoir des « projets conjoints » entre la France et l’Allemagne afin de développer les énergies renouvelables et favoriser l’« efficacité énergétique » (cf. French Desk Newsletter, édition N 1/2019 – « un sujet macro-économique : couple franco-allemand, amitié franco-allemande, initiatives franco-allemandes…Où en eston ? »). Pour l’instant, le traité d’Aix-la-Chapelle ne s’est pas encore traduit par des avancées concrètes.

Mais l’Allemagne a tout de même fortement développé les énergies renouvelables sur son territoire et ceci, dans le but de sortir définitivement du nucléaire en 2022. Bien que critiquée par son utilisation excessive des très polluantes centrales à charbon, l’Allemagne fait par exemple figure de pionnière dans l’hydrogène de l’électromobilité, une technologie « zéro émission » destinée à remplacer le diesel. Ainsi, en septembre 2018, le premier train à hydrogène au monde a été mis en service en Basse-Saxe dans le cadre d’un contrat signé avec le constructeur français Alstom, qui devra livrer à l’Allemagne au total 14 rames à partir de 2021 pour environ 80 millions d’euros.

Les investissements nécessaires pour atteindre les objectifs fixés au niveau européen sont importants et nécessitent une volonté politique forte pour porter ces projets. Il va être intéressant d’observer si l’augmentation de la représentation des partis écologistes au parlement européen apportera une impulsion à une transition énergétique européenne maitrisée et durable.

Auteur : Camille Dubois