Un sujet comptable : Les provisions pour risques et charges

La définition des provisions pour risques et charges (PRC) françaises et des « Rückstellungen » allemandes, au même titre que leur présentation au bilan, sont bien différentes. Depuis la Loi de Réforme Comptable allemande (BiLMoG) en 2009, les différences se sont toutefois atténuées.

Sont considérés en Allemagne comme provisions toute dette et tout engagement dont la réalisation, ou le montant ou les deux sont incertains. Si la réalisation et le montant sont certains, il s’agit d’une dette et non d’une provision.

La définition des provisions au § 249 HGB

Le § 249 du Code Commerce Allemand (HGB) définit les provisions dont la constitution est obligatoire. Il s’agit de deux types de provisions générales,

  • les provisions pour dettes incertaines,
  • les provisions pour pertes sur affaires en cours / pertes à terminaison

et de trois provisions particulières,

  • pour les coûts de garantie sans engagement juridique,
  • pour certaines dépenses de maintenance et
  • pour certains coûts de déblaiement.

La constitution de provisions pour des motifs autres que ci-dessus n’est pas autorisée. Les provisions doivent être présentées à hauteur du montant qui s’avère nécessaire à leur extinction dans le cadre d'un jugement honnête et avisé. Un jugement est honnête et avisé quand il établit une répartition des probabilités non influencée par une appréhension subjective du risque et tenant compte de toutes les informations.

Le principe de prudence, qui doit être également appliqué lors de l’évaluation des provisions, est respecté quand les engagements incertains sont évalués au montant le plus probable et non pas au montant le plus défavorable. Les augmentations de prix et de coûts futurs doivent être prises en considération. Parallèlement, les diminutions de prix et de coûts futures doivent être prises en considération dans la mesure où ceci reste compatible avec le principe de prudence.

Depuis l’introduction de la Loi de Réforme Comptable (BilMoG), les provisions ayant une échéance supérieure à un an doivent être actualisées au taux d’intérêt moyen des sept derniers exercices qui correspond à leur échéance (§ 253 alinéa (2) phrase 1).

Les provisions doivent être reprises si elles n’ont plus d’objet.

Les provisions pour dettes incertaines correspondent à des engagements vis-à-vis de tiers présentant un caractère de dettes mais pour lesquelles il existe une incertitude quant à leur survenance et/ou leur montant. La plupart des provisions se trouve dans cette catégorie. C’est le cas notamment des provisions pour pensions et obligations similaires et des provisions pour impôts.

Les provisions pour pertes sur affaires en cours sont à doter lorsque des engagements pris mais pas encore exécutés à la date de clôture conduisent à des pertes connues. Les provisions pour pertes à terminaison le sont lorsque des contrats de construction non terminés à la date de clôture conduisent déjà à des pertes.

Les trois provisions spécifiques obligatoires ont la particularité, dans le premier cas, de ne pas reposer sur un engagement ferme et, dans les deux derniers cas, de concerner des charges de l’exercice courant, ne pouvant être provisionnées à l’avance.

Les provisions pour coûts de garantie sans engagement juridique porte sur des obligations factuelles, sans être contractuelles ou légales. Il s’agit par exemple de garanties à donner après l’expiration d’une garantie contractuelle ou légale.

Les provisions pour dépenses de maintenance doivent répondre à des critères spécifiques :

  1. l’obligation de maintenance existait lors de l’exercice, mais a dû être différée sur l’exercice suivant,
  2. Les travaux ont bien été réalisés lors des trois premiers mois de l’exercice suivant. Passé ce délai, la provision est interdite. 

Les provisions pour coûts de déblaiement doivent répondre aux mêmes critères que dans le cas précédent, la différence étant la période de réalisation des travaux qui est de douze au lieu de trois mois.

Les provisions au bilan allemand

Indépendamment de la définition du § 249 HGB, les provisions allemandes sont regroupées dans le bilan allemand en trois natures de provisions et dans l’ordre suivant :

  1. les provisions pour pensions et obligations similaires,
  2. les provisions pour impôts et
  3. les autres provisions.

Les deux premières catégories font partie des provisions pour dettes incertaines, la troisième est mixte et contient tous les cinq types de provisions énumérés plus haut.

Le calcul des provisions pour pensions et obligations similaires, doit tenir compte des éléments suivants:

  • de l’augmentation des salaires et des retraites ainsi que de la fluctuation des salariés,
  • des échéances réelles sous l’hypothèse d’une durée moyenne de 15 années,
  • le taux d’actualisation est le taux d’intérêt moyen glissant des sept dernières années déterminé par la Bundesbank. A compter des exercices clos au 31 décembre 2015, le taux d’actualisation sera le taux moyen des dix dernières années (uniquement pour les engagements de retraites).

La nouvelle méthode de calcul prescrite par la Loi de Réforme Comptable Allemande de 2009 a conduit à une augmentation immédiate et significative des provisions pour retraites. La Loi a donné néanmoins aux entreprises la possibilité d’étaler la dotation de cet écart sur une période de 15 ans.  

La nature des provisions pour pensions et obligations similaires allemandes n’est pas identique à celles du compte 153 du PCG Français. En France, il s’agit essentiellement d’indemnités de départ à la retraite conduisant à versement unique. En Allemagne, il s’agit d’engagements de pensions de retraites donnés par l’entreprise et généralement couverts par des organismes de retraite par capitalisation ; les entreprises allemandes ne sont toutefois pas obligées de consentir à leurs employés de tels engagements, la tendance étant d’ailleurs depuis plusieurs années, en raison du coût de ces engagements, qu’aucun engagement ne soit accordé aux employés. 

Constituant une exception à la règle d’interdiction de compensation, les actifs de couverture exclusivement dédiés au service des engagements de retraites sont à compenser avec les passifs correspondants.

Les provisions pour impôts comprennent les impôts dus au titre des exercices en cours ou antérieurs qui sont présentés dans le bilan français comme dettes, notamment les impôts sur les bénéfices. Tant que les impôts sur les bénéfices ou les redressements fiscaux ne sont pas notifiés, ils sont présentés en provisions. Ces provisions ne sont pas identiques, mais s’apparentent à celles du compte 155 du PCG.

Les autres provisions regroupent toutes les autres natures de provisions pour risques et charges, notamment celles des comptes 151, 157 et 158 du PGC Français, mais pas seulement ces postes. A cela s’ajoutent le compte 408 du PGC des factures à recevoir (fournisseurs et dettes rattachées) ainsi que le compte 428 du PGC des charges à payer envers le personnel.

Les variations de provisions au compte de résultat allemand

Aux différences de présentation des provisions au bilan, s’ajoutent de manière encore plus marquée celles des variations de ces provisions dans le compte de résultat Allemand.

Il n’existe pas en Allemagne de comptes spécifiques de dotation aux provisions (du passif de bilan) comme en France. La dotation se fait sur le compte de charge de nature correspondante. Il en va de même de l’utilisation des provisions (au crédit du compte de charge). Seule la reprise de provision non utilisée est comptabilisée en autres produits d’exploitation.

Cette particularité rend une comparaison des comptes de résultat français et allemands particulièrement difficile. Le retraitement d’un compte de résultat allemand demande une analyse approfondie des charges.

Pour toutes questions autour de ce sujet, n’hésitez pas à contacter Patrice de Folleville (patrice.de.folleville@mazars.de) ou Jean-Marc Fournier (jean-marc.fournier@mazars.de), associés chez Mazars en Allemagne.