Un sujet Macro-économique : Le rapprochement franco-allemand en 2018

Dès son élection à la présidence de la République française, E. Macron, a souhaité redonner un élan au couple francoallemand. La vision pour l’Europe du président et notamment sa volonté d’accélérer l’intégration européenne, place désormais la France en position de chef de file de la construction européenne.
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La réélection de la chancelière Angela Merkel, leader de l’Union Européenne au cours de cette dernière décennie a laissé présager une constellation franco-allemande optimale pour accomplir des projets européens ambitieux et concrets.

Un an après l’élection des deux chefs d’Etats, où en est-on ?

1. Retour sur l’histoire franco-allemande et son impact dans la construction européenne

L’Histoire de la construction européenne remonte à la fin de la Seconde Guerre Mondiale et l’envie de mettre un terme à la rivalité franco-allemande et aux guerres. Il s’agit aussi de créer un front uni pour faire face à la menace soviétique et aux nouveaux enjeux de pouvoir qui surgissent avec la guerre froide.

Le couple franco-allemand cherche donc à établir une alliance forte et équilibrée qui non seulement assurera la paix entre les pays européens, mais sera également un symbole garant des valeurs de cette alliance : la sécurité, l’intégration et la coopération. Le poids économique, diplomatique et géographique des deux pays, fait de l’alliance franco-allemande une condition sine qua non de la construction du modèle européen.

La signature du traité de l’Elysée en 1963 aussi appelé traité franco-allemand, par le Général de Gaulle et Konrad Adenauer en sera une représentation. Bien que leurs visions ne soient pas parfaitement alignées, le traité rapproche les visions allemandes et françaises sur les questions stratégiques, indispensable pendant cette période de guerre froide.

55 ans après la signature de ce traité, la situation géopolitique n’est plus la même, et l’Europe a bien du mal à faire des consensus face aux multiples défis qu’elle doit affronter.

La montée de l’euroscepticisme, qui s’est traduite notamment par le Brexit, rend le consensus plus compliqué entre les Etats européens. Or, l’Europe est au centre d’enjeux, notamment migratoires, énormes qu’il faudrait résoudre collectivement. « Le contexte européen et international de 2018 diffère fondamentalement de celui qui prévalait voici 55 ans. Les deux pays ont tout intérêt à s’appuyer sur des relations francoallemandes plus efficaces et capables de mobiliser l’ensemble des ressources disponibles pour relever les défis européens, qui ont pris une ampleur considérable dans presque tous les domaines. » (Groupe de réflexion franco-allemand, « Vers un nouveau traité de l’Élysée : une coopération franco-allemande plus substantielle au service de l’Europe », Éditoriaux de l’Ifri, 17 avril 2018.)

Ainsi, les défenseurs d’une Europe intégrée voient dans la situation actuelle une opportunité unique de renforcement des liens entre la France et l’Allemagne.

Si le président Macron a clairement mentionné qu’il souhaite « un nouveau départ pour l’Europe », le nouveau contrat de coalition allemand reste plus flou sur ses intentions pour l’Europe.

La stratégie d’Emmanuel Macron est simple, il souhaite fournir suffisamment de gage à l’Allemagne pour lui prouver que la France fait les efforts de politique intérieure souhaités par le gouvernement allemand. En échange elle attend de l’Allemagne qu’elle soutienne une souveraineté européenne.

2. Le renouvellement du traité de l’elysée

Emmanuel Macron et Angela Merkel ont annoncé en janvier 2018 qu’ils souhaitaient renouveler le traité de l’Elysée. Quelles sont donc les points d’amélioration souhaités ? Et où en est-on huit mois après cette annonce ?

Le nouveau traité de l’Elysée devrait être signé le 22 janvier 2019, date anniversaire du premier traité. Le Bundestag allemand et l’Assemblée Nationale travaillent conjointement à l’élaboration du nouveau traité. Le but est clairement affiché : « Afin de renforcer le rôle des assemblées dans la coopération franco-allemande, l’Assemblée nationale et le Bundestag élaboreront en outre un accord parlementaire. Cette convention a pour objectif d’intensifier la collaboration et la concertation entre les deux assemblées. Elle doit contribuer à la réalisation du Traité de l’Élysée renouvelé par une coopération parlementaire plus étroite. Dans le même temps, les deux assemblées réaffirment leur volonté, proclamée dans la déclaration adoptée lors du 50e anniversaire du Traité de l’Élysée, le 22 janvier 2013, d’approfondir leur coopération dans de nombreux domaines. » (Assemblée Nationale, Proposition de Résolution pour un nouveau Traité de l’Élysée, n°542 (rectifié), 22 janvier 2018).

Le premier aspect du renouvellement du traité de l’Elysée porte sur le renforcement des relations culturelles et linguistiques, à travers notamment l’ouverture de nouvelles classes bilingues ou bilangues, un soutien renforcé à l’OFAJ (Office Franco-Allemand pour la Jeunesse), la reconnaissance des qualifications professionnelles dans les deux pays, l’augmentation du nombre d’instituts Goethe, l’augmentation du nombre de classe permettant d’obtenir un double diplôme (Baccalauréat/Abitur), l’accroissement du nombre de villes jumelées, etc.

Un aspect également important est l’accroissement de la coopération transfrontalière avec notamment l’amélioration des transports et la mise en place d’un seuil minimum de droit sociaux afin de diminuer les entraves au travail dans les régions transfrontalières.

Le nouveau traité de l’Elysée devra établir qu’il est de l’intérêt des deux pays de remédier de façon cohérente aux causes des migrations, d’échanger les bonnes pratiques en matière d’accueil des réfugiés et de coordonner les mesures prises en matière de politique migratoire.

3. Projets en cours en 2018

DÉFENSE

La France et l’Allemagne souhaitent s’engager dans une politique étrangère et de sécurité renforcée à l’échelle de l’Union Européenne. Pour cela ils souhaitent renforcer et développer les instances de sécurité via notamment les coopérations structurées permanentes (CSP)1, la mise en place d’un fonds européen de défense, la mise en place d’un pacte européen de sécurité présenté en 2016, l’approfondissement des échanges entre les commissions parlementaires, les ministres et les secrétaires d’Etats en charge des questions relatives à la sécurité et à la défense, ainsi que la coordination des formations d’état-major général.

INNOVATION

France et Allemagne sont convaincus de la nécessité de se rapprocher également dans le domaine de l’innovation.

Il est évoqué la possibilité de créer une Agence européenne de l’innovation de rupture, à partir d’une initiative francoallemande. Mais à ce jour les initiatives communes ou concertées sont encore trop rares.

FISCALITÉ

Un autre projet plaide pour « la réalisation d’un espace économique franco-allemand avec des règles harmonisées, notamment en ce qui concerne le droit des sociétés et l’encadrement des faillites d’entreprises. Une harmonisation de l’assiette de l’impôt sur les sociétés et un travail plus large de convergence constitueraient une étape majeure. Les deux pays s’engageraient en faveur d’une harmonisation significative des règles pour la réalisation du marché intérieur européen » (Assemblée Nationale, Proposition de Résolution pour un nouveau Traité de l’Élysée, n°542 (rectifié), 22 janvier 2018).

Ce projet souvent évoqué constituerait une avancée significative en matière d’intégration européenne.

CLIMAT

Enfin, la France et l’Allemagne souhaitent mettre en commun leurs forces pour lutter contre le changement climatique. Au programme, un renforcement de la coopération pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris sur le climat en 2015 et ceux de « One Planet Summit » en 2017. Il est également attendu des propositions en matière de prix du carbone, et de collaboration de recherche et développement.

Les parlementaires sont à la tâche et bien que plusieurs effets d’annonce aient été fait, notamment lors de la déclaration de Meseberg de juin 2018, pour l’heure aucune mesure concrète n’a été prise par le couple Macron/Merkel. Il nous faudra probablement attendre jusqu’à janvier prochain pour voir les premières propositions du nouveau couple franco-allemand émerger. Espérons qu’elles soient à la hauteur des attentes qu’elles ont suscitées et que les développements politiques dans les deux pays ne viennent pas contrecarrer cette nécessité d’agir.

1 CSP : La coopération structurée permanente est une disposition du traité de Lisbonne qui introduit la
possibilité pour un noyau d‘États de l‘Union européenne de développer leur collaboration dans le domaine de la défense.

Auteur

Camille Dubois

Sources

  • http://www.eurocontinent.eu/2018/06/le-couple-franco-allemand-et-les-nouveauxequilibres-geopolitiques-europeens/#_edn3
  • http://www.assemblee-nationale.fr/15/propositions/pion0542.asp
  • https://www.lemonde.fr/europe/article/2018/01/22/il-y-a-cinquante-cinq-ans-letraite-de-l-elysee-marquait-le-rapprochement-franco-allemand_5245069_3214.html
  • https://www.ifri.org/fr/publications/editoriaux-de-lifri/vers-un-nouveautraite-de-lelysee-une-cooperation-franco-allemanderapprochement-francoallemand_5245069_3214.html
  • https://pt.ambafrance.org/Declaration-franco-allemande-de-Meseberg-19-juin-2018